Un véritable ovni de la compétition cannoise, signé par un vétéran de 84 ans, le Polonais Jerzy Skolimowski. Il faut dire que dans Eo, le point de vue adopté est celui d’un âne. Pendant une heure vingt-sept, le spectateur est amené à s’identifier à cette créature débonnaire, dans ses vies successives : animal de cirque, ballotté entre un haras, une ferme ou une ville désertée. Caressé par un groupe d’enfants complices ou battu à mort par des hooligans enragés. Embarqué dans une filière clandestine de viande chevaline aussi. Il passera à deux doigts de finir en salami. Très peu de dialogues, mais une expérience sensitive vraiment surprenante confirmant que la vie est juste une question de point de vue. Pourquoi pas celui d’un animal manifestement doté de conscience ?
Un bijou aux airs de fable picaresque tragi-comique, inspirée de Robert Bresson (Au hasard Balthazar, 1966), et où les humains restent à leur place, au second plan. Fascinant.